Pour quelle raison, le conducteur respecte-t-il le «code de la route»? C'est une question posée par Laurent Carnis et ses collègues, chercheurs de l'Université Gustave Eiffel et de l'Université Serema.
Laurent Carnis est directeur de recherche à l'Université Gustave-Eiffel. Avec ses collègues Julien Cestac, Jean-Pascal Assailly, Cédric Garciails et Chloé Eyssartier du Cerema (Centre de Recherche et Professionnalisme Risques, Environnement, Mobilité et Planification), ont publié le "Enquête sur la relation entre les automobilistes français et la réglementation".  Une équipe interdisciplinaire composée d'économistes, de statisticiens et de psychologues leur permet de se croiser leurs datas.

Comment sont perçus les dispositifs de contrôle routier?

En général, les gens pensent que le feu rouge et le radar de vitesse sont très efficaces, assez fiables, relativement justes, équitables et placés dans des endroits dangereux. D'un autre côté, si nous regardons attentivement les résultats, nous constaterons que le jugement du radar de lumière rouge est plus que le jugement du radar de vitesse. C'est très intéressant, car nous ne sommes que des personnes déclaratives, donc c'est basé sur les opinions des gens, ces personnes reflètent sans aucun doute la pratique du réseau routier, mais reflètent aussi l'influence des pairs, des médias, des discussions, etc.

Quel est le rapport des conducteurs aux règles?

Les règles du code de la route ne forment pas un tout. Même si elles sont collectées dans le code de la route, elles n'impliqueront pas le même comportement. La personne qui contrôle la vitesse est différente de la vitesse qui vous est imposée en portant un casque, en interdisant le téléphone ou en buvant au volant. C'est relativement basique, mais la relation avec la règle dépendra du type de règle et de la façon dont les utilisateurs la perçoivent.
Par conséquent, certaines règles peuvent être considérées comme une atteinte à la vie privée, tandis que d'autres sont considérées comme une atteinte à la liberté. Correct ou pas ailleurs. Au contraire, si les règles sont considérées comme une protection contre les comportements dangereux ou mises en œuvre dans des environnements plus ou moins complexes, les règles seront mieux acceptées. Le feu rouge est un bon exemple.

Les normes sociales ont-elles un impact?

Les normes sociales peuvent être un levier pour améliorer la situation, ou au contraire constituer une forme de boycott. Il y a des problèmes concernant la compréhension des règles, et nos recherches ont mis l'accent sur ces problèmes. Il existe des normes dites d'interdiction et des normes descriptives. Une interdiction est ce que l'on pense que les autres attendent de lui. Si mes connaissances aiment prendre des risques, je serai également encouragé à prendre des risques, à conduire à grande vitesse pour prouver que mon véhicule fonctionne correctement, etc.
Je crois que d'autres personnes peuvent également utiliser des normes descriptives. Si je pense que le comportement des autres est bon, cela me rappellera que je fais du bon travail car il est coûteux de se comporter différemment des autres.

Et la conditionnalité?

Parfois, les conditions remplacent les prescriptions. Cette règle n'est pas toujours suivie partout. Nous respectons les règles car je suivrai les règles sous certaines conditions et vice versa. Par exemple, lorsque je suis seul sur Internet, je conduirai à grande vitesse sur l'autoroute, mais pas en présence d'autres véhicules.

...Et l'auto indulgence?...

Oui, c'est ce qu'on appelle un biais plus optimiste. Nous sommes meilleurs que les autres. Si je fais une erreur, il y a toujours une bonne raison pour laquelle ce n'est pas ma faute. J'accélérais et j'ai été attrapé, non pas parce que j'étais un mauvais conducteur, mais à cause de la route qui me conduisait ... ou j'avais une voiture qui me poussait à engager des dépenses excessives. En revanche, si quelqu'un accélère, nous ne serons pas aussi tolérants, car c'est sans aucun doute un mauvais conducteur. Lorsque vous posez des questions aux autres, certaines personnes pensent qu'elles sont meilleures que d'autres. À moins que cela ne soit contradictoire, si tout le monde est meilleur que tout le monde, il y aura forcément moins de bonnes personnes.